|
Les pays d'Afrique de l'Ouest
se préparent à lancer une monnaie unique, sur une
base plus large que l'actuelle zone franc. Comme le franc CFA, cette
monnaie serait arrimée à l'euro.
Johannesburg,
10 janvier 2002: Le 1er janvier 1999, le franc CFA (Communauté
financière africaine) a été ancré à
l'euro au taux de change fixe de 1 euro pour 655,957 francs CFA.
Cette opération s'est réalisée sans heurts
malgré les structures économiques radicalement différentes
des deux communautés. Les pays essentiellement agricoles
et sous-développés d'Afrique centrale et occidentale
[voir ci-contre], qui ont connu il n'y a pas si longtemps l'exploitation
coloniale, ont établi un lien fructueux avec les pays très
industrialisés de l'Union européenne, dont beaucoup
sont d'anciennes puissances coloniales. L'intégration monétaire
devrait se poursuivre avec le même succès. "L'arrivée
de l'euro ne modifiera pas le taux de change du franc CFA",
prédit Charles Konan Banny, gouverneur de la Banque centrale
des Etats de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO).
La zone franc, créée en 1939, visait à l'origine
à doter les anciennes colonies françaises d'une monnaie
unique indexée sur le franc français. Elle a survécu
aux indépendances, grâce à la décision
des autorités monétaires françaises de garantir
la convertibilité du franc CFA. Cette garantie a été
reconduite avec l'entrée du franc français dans l'Union
monétaire européenne le 1er janvier 1999. "Cette
convertibilité a assuré aux Etats membres de la CFA
une monnaie stable, et elle a créé un climat favorable
à l'investissement étranger et au commerce",
estime un porte-parole de la Banque de France. Cela parce que "le
taux de change indexé réduit les risques liés
aux unités monétaires faibles".
Le Franc CFA a permis de maitriser l'inflation
Selon l'institut d'émission français, les Etats membres
de la CFA ont pu ainsi éviter les problèmes qui assaillent
habituellement les pays du tiers-monde, tels que l'existence de
marchés parallèles pour les devises étrangères,
le contrôle des changes ou les infractions à la réglementation
des changes. "Le franc CFA a également permis de
maîtriser l'inflation grâce à l'arrimage au franc
français et à l'euro", assure la Banque centrale
française. La Banque de France prévoit une croissance
des échanges interrégionaux avec l'arrivée
de l'euro. L'UE est d'ores et déjà le principal partenaire
commercial des pays de la CFA. Elle absorbe près de 70 %
des exportations de cette zone et lui fournit plus de 60 % des biens
qu'elle importe.
Le taux de change fixe exige des 14 pays africains une coordination
de leur politique monétaire et le respect de rigoureuses
règles monétaires et budgétaires. Toutes les
réserves internationales des pays membres sont déposées
dans les trois Banques centrales de la région.
Mais, pour certains économistes et experts en développement,
le système ne présente pas que des avantages. La France
contrôle la politique monétaire de la CFA afin de s'assurer
que certaines clauses sont respectées - et elle fait payer
ce service. Les 14 Etats membres doivent déposer au moins
65 % de leurs avoirs étrangers sur des comptes à la
Banque de France.
Le rattachement à une devise forte impose certaines contraintes.
"Les contrôles sont nécessaires pour éviter
les erreurs en matière de politique monétaire et budgétaire",
explique l'économiste Philippe Frémeaux [rédacteur
en chef du mensuel français Alternatives économiques
]. "Mais les économies africaines sont structurellement
faibles, et une monnaie forte est un fardeau qui pèse sur
la compétitivité."
Si l'Euro baisse, le service de la dette
s'alourdira
Une monnaie forte permet à un pays d'acheter les produits
étrangers à des prix relativement bas. Mais le taux
de change élevé renchérit les biens nationaux
et rend moins compétitives les exportations. Les Etats membres
de la CFA sont obligés d'assurer un "taux de change
fixe élevé qui est incompatible avec la productivité
des économies régionales et qui entame leur potentiel
de croissance économique", poursuit M. Frémeaux.
D'autres experts soulignent le comportement erratique de l'euro
sur les marchés des changes internationaux, ce qui affectera
le service de la dette des pays africains. "Toute dépréciation
de la monnaie unique européenne par rapport au dollar alourdira
mécaniquement le service de la dette des pays de la CFA",
fait remarquer Gerhard Leithaeuser, un économiste allemand
qui a travaillé plusieurs années pour la Commission
économique des Nations unies pour l'Afrique. M. Leithaeuser
prédit une dépréciation de l'euro durant les
toutes premières semaines de 2002.
Malgré ces propos alarmistes, la CFA continue de servir de
modèle à d'autres programmes d'intégration
économique régionale. Ainsi, une nouvelle union régionale
a récemment vu le jour [en 1975] : la Communauté économique
des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Les six pays anglophones
d'Afrique subsaharienne (Gambie, Ghana, Guinée, Liberia,
Nigeria et Sierra Leone) qui en font partie ont décidé
de mettre en place des institutions et des politiques monétaires
similaires à celles des membres de la CFA. La CEDEAO envisage
la création d'une monnaie unique et d'une Banque centrale
commune d'ici à janvier 2003 et une union monétaire
avec la CFA à l'horizon 2004. Dans la pratique, cela signifierait
que 20 pays d'Afrique subsaharienne auraient une monnaie commune
indexée sur l'euro. Elle apporterait ses forces - mais aussi
ses faiblesses - à une grande partie de l'Afrique.
|
|
|
|
|
|
MAIL & GUARDIAN
Johannesburg
|
|
|
|
|
|
|
|
|
La zone franc CFA
se subdivise en deux groupes : l'Union économique
et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et la Communauté
économique et monétaire d'Afrique centrale (CEMAC).
|
|
|
|
|
|
L'UEMOA compte 8 pays
à svoir le Bénin, le Burkina Faso, la Côte-d'Ivoire,
la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal
et le Togo. |
|
|
|
|
|
La CEMAC rassemble 6
à savoir le Cameroun, la Centrafrique, le Congo, la Gabon,
la Guinée-Equatoriale et le Tchad).
|
|
|
|
|
|
Les pays de l'UEMOA font
partie d'un ensemble plus vaste, la Communauté économique
des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), qui regroupe 16
pays francophones, lusophones et anglophones.
|
|
|
|
|
|
|
|
|
REAGIR A CET ARTICLE
|
|
|
|
|
|
N.B. La rédaction garantit la confidentialité
de votre identité et votre adresse électronique,
si vous le souhaitez
|
|
|
|
|
|